L’association Secours de France a pour mission d’apporter à ceux qui ont souffert de leur engagement au service de la France et à leurs familles un soutien matériel et moral.
Cette mission de base se décline de trois façons :
- un soutien matériel aux « oubliés » de l’Histoire et aux persécutés d’aujourd’hui
- une aide financière aux plus jeunes et, en particulier, aux petits enfants de harkis
- une action de sensibilisation de l’opinion à des réalités historiques déformées ou passées sous silence.
Vis, aime, deviens la France… La belle ambition de Cap Jeunesse Entretien avec Pierre-Louis SANTOS, Président de CAP JEUNESSE
Le chiffre de 150 000 jeunes qui sortent de l’école ou du collège sans aucune formation et viennent grossir chaque année les rangs des « desperados de banlieue », interpelle médias et commentateurs. Il convient de remettre cette statistique en perspective. Depuis 40 ans que le « problème des zones périphériques» a été détecté et donné lieu à des « politiques de la ville » successives, de droite comme de gauche, plus de 100 milliards d’euros ont été investis, pour la plus grande part, il est vrai, dans des programmes de rénovation urbaine . Et en 40 ans, le cumul de ces jeunes en échec scolaire, mais aussi en déshérence familiale et morale, a conduit à compter par millions les laissés pour compte de la communauté nationale. Nombre d’entre eux constituent des réseaux de délinquants de tous ordres, de trafiquants de toutes substances, de candidats à tous les djihads et de kamikazes pour tous les crimes individuels et collectifs. Et, surtout, ils obéissent – et le proclament – à d’autres règles culturelles, d’autres modes de vie, d’autres critères et d’autres modèles de hiérarchies sociales, que les nôtres, forgés par notre Histoire.
Pourtant des remèdes existent et s’appliquent avec succès, certes encore, pour l’instant à l’échelon de l’initiative individuelle ou de l’institution locale, et le Secours de France a apporté son soutien à certaines d’entre elles particulièrement méritoires, telles que les établissements scolaires hors contrat de la fondation Espérance Banlieue. Mais si ces initiatives fleurissent et perdurent, encore convient-il de les faire connaitre, de les accompagner, de susciter l’émulation, de mobiliser, dans le même esprit, des structures comparables, publiques et privées qui se sentent, parfois, quelque peu orphelines dans l’exercice de leur mission.L’Association Cap Jeunesse a cette ambition et construit son réseau sur tout le territoire français. Son Président, Pierre-Louis SANTOS répond aux questions du Secours de France.
Patrice Boissy
Secours de France – Quel est le constat à l’origine de la création de Cap Jeunesse ?
P.L. Santos – Je compare souvent notre société à un élastique tendu entre deux pôles :
– d’un côté le monde dans lequel nous vivons qui, quel que soit le niveau de vie des uns et des autres, les métiers exercés, les modes d’existence, obéit à un ensemble de règles comportementales, à un code de conduite construit au fil des siècles, ce qui n’empêche pas, bien sûr, les divergences ou les oppositions idéologiques ;
– de l’autre, un autre monde, composé d’individus et de groupes, soit qui ne se reconnaissent pas dans notre système, soit qui n’en détiennent pas les clés, tout en souhaitant y accéder. Je pense, en particulier à ces quelques 2 millions de jeunes en échec scolaire, social et professionnel, d’autant plus frustrés et souvent agressifs qu’ils imaginent, via la télé et Internet, un autre monde où règnent « calme, luxe et volupté »…
Or l’élastique est tendu à l’extrême : il va finir pas casser…N’en vivons-nous pas prémisses depuis ces derniers mois ?
S de F. – Et pourtant le problème est connu, les solutions recherchées autant dans la politique de la Ville que par des réformes portées par l’Education Nationale…
P.L S. – Ce n’est pas seulement en modifiant le cadre de vie par la rénovation urbaine, en créant des zones d’éducation prioritaire, ou en favorisant l’emploi par des avantages fiscaux aux entreprises que l’on comble la principale lacune dont souffrent les jeunes dits « déclassés ». La non maîtrise de nos propres codes comportementaux et de nos propres valeurs les conduit à en adopter d’autres, parfois non conformes à notre propre « Code » Pénal, à se doter de modèles différents, à instituer des hiérarchies sociales « parallèles ». L’échec scolaire, le chômage, sont des conséquences et non les causes de ce déclassement.
S de F. – Que faire, dans ces conditions ?
P.L. S – Un constat s‘impose : il existe dans le pays, autour de personnalités fortes, sinon charismatiques, engagées dans un cadre associatif ou institutionnel, des initiatives multiples tendant, par des moyens très divers – pédagogiques, culturels ou sportifs – à remettre cette jeunesse déboussolée sur les rails, lui permettre, en quelque sorte, de se construire, en intégrant les codes de la communauté nationale. Faire connaître ces initiatives, améliorer leur visibilité, les aider en termes d’outils et de moyens, favoriser la mise en commun d’expériences, susciter l’émulation et l’essaimage, tels sont nos objectifs essentiels.
S de F – De fait, comment définiriez-vous Cap Jeunesse ?
P.L S – Juridiquement, nous sommes constitués en association, loi de 1901. Dans la pratique nous nous présentons comme un « collectif », aconfessionnel, apolitique et indépendant, réunissant l’ensemble des acteurs qui se consacrent exclusivement à cette mission, avec le concours des entreprises, institutions, associations et particuliers qui se reconnaissent dans son texte fondateur.
S de F – Texte fondateur…?
P.L S – Il se définit par une « plateforme » commune à laquelle doivent adhérer ceux qui nous rejoignent :
– d’une part, autour d’une série de valeurs très précises : dévouement au bien commun, solidarité et fierté d’appartenance à un groupe, croyance affirmée dans la vertu du travail, de l’effort et du dépassement de soi, comme dans celle de l’acte gratuit et désintéressé, foi dans le caractère exemplaire de l’action.
– d’autre part, autour de quatre principes d’action, dont les termes sont pesés :
- montrer aux jeunes qu’on les aime ;
- leur fournir un cadre régi par des règles claires et justes qu’ils s’engagent à respecter ;
- leur fournir les repères de citoyenneté indispensables ;
- les mette sur le chemin de l’emploi…
C’est à partir de cette « Charte » que Cap jeunesse propose de rassembler tous ceux qui participent de cette démarche : que ces dizaines de milliers de « décrocheurs » deviennent des citoyens français dans tous les sens du mot, avec pour perspective le retour à l’emploi. Je le rappelle, c’est moins l’échec scolaire que la non connaissance des codes culturels et comportementaux en usage qui expliquent, dans plus de 50% des cas, le rejet, à l’embauche ou après l’embauche, de ces jeunes candidats à l’emploi….
S de F – Une telle ambition suppose une action très en amont pour, en quelque sorte, « reformater » les modes de comportement, les postures, les caractères, jusqu’à la mentalité même de cette masse de jeunes « décrocheurs»….
P.L S – C’est pourquoi nous nous engageons vis-à-vis des employeurs partenaires de Cap Jeunesse, et qui sont tous demandeurs, à assurer cette « mise à jour » comportementale ainsi que l’acquisition de « pré requis » fondamentaux qui font défaut à cette jeunesse : ne pas y souscrire lui interdit tout simplement d’exister au sein de notre société et d’être à l’aise dans la vie sociale comme dans le travail. Bien entendu ce sera la tâche de nos associations partenaires adhérentes à notre texte fondateur ; nous travaillons sur divers « outils » qui leur seront proposées. Et, pour ceux de nos partenaires, sans aucune attache, ni scolaire, ni administrative, ni associative, nous agirons en direct… Cap-Jeunesse est en train de constituer des équipes de formateurs bénévoles sur tout le territoire national, en s’appuyant, notamment sur des jeunes retraités civils et militaires. Je vous précise que nous avons, dès aujourd’hui, plus de 7 000 offres d’emplois en portefeuille, accessibles à ces jeunes …
S de F – comment caractériser ces «pré requis» constitutifs du « label » de Cap Jeunesse vis-à-vis des employeurs potentiels ?
P.L S – Après étude et de nombreuses consultations, nous avons retenus dix acquis fondamentaux: six généraux et quatre spécifiques.
Les premiers portent sur :
- les règles de comportement nécessaires pour intégrer la structure de l’employeur, qu’il s’agisse d’entreprises, d’administrations ou de collectivités publiques,
- le savoir vivre au sein de notre société,
- un minimum de Culture générale, Histoire de France, Géographie,
- l’appréhension des trois religions du Livre,
- l’expression écrite et orale,
- une bonne vision du civisme et des institutions,
- la connaissance et l’estime de soi.
Les seconds sont les atouts primaires d’une entrée dans le monde du travail :
- informatique,
- permis de conduire,
- langues
S de F – Le coup d’envoi de Cap Jeunesse date de juin 2016. Où en êtes-vous de ce vaste programme ?
P.L S – Nous devons simultanément :
procéder à une communication tous azimuts : création et développement du site internet, présence régulière dans les médias, organisation d’évènements dans les régions et au plan national : conférences de presse, débats publics, vidéos, rencontres systématiques avec les leaders d’opinion et les acteurs économiques ;
- mettre en place nos structures opérationnelles : au-delà de notre conseil d’administration, notre comité de pilotage national et régional, nous nous dotons d’un secrétariat, pour l’instant à mi temps, de locaux et de moyens informatiques ;
- mettre en œuvre « l’action terrain » : création et expérimentation des outils, recrutement d’adhérents, personnes physiques et morales, organisation d’activités communes etc.…
Tout cela est une œuvre de longue haleine, mais, en quelques mois nous nous sommes implantés dans 4 régions, avec une quinzaine d’associations adhérentes, locales, régionales, voire nationales, nous sommes déjà soutenus par une dizaine d’entreprises, certaines disposant de réseaux sur toute la France.
Notre plan prévoir la couverture nationale fin 2018.
S de F – Et le nerf de la guerre ?
P.L S – Depuis l’origine, soit 2015, nous nous appuyons sur le bénévolat et nous comptons bien poursuivre dans cette voie. Mais nos propres ressources ne sont pas inépuisables. Notre plan de développement prévoit au total un investissement cumulé de 1 160 000 euros, sur trois ans C’est beaucoup et c’est peu au regard de l’ampleur de la tâche. C’est pourquoi nous avons besoin du soutien de tous, et pas seulement financier, tant au niveau national que local, particuliers, associations, entreprises, mais aussi des Pouvoirs publics qui disposent déjà de réseaux d’assistance et d’animation qu’il convient de convaincre sur le bienfondé de notre démarche.
S de F – Certains esprits, qui se disent « réalistes », ont tendance à opposer à votre entreprise, d’une part l’idée qu’elle va se heurter à la résistance de situations acquises dans les banlieues, parfois d’ailleurs, cimentées par les traditions religieuses ou para religieuses et, d’autre part, pour les plus pessimistes d’entre eux, que votre vaste et sympathique initiative arrive trop tard et que les jeux sont faits.
P.L S – Il est vrai que le pessimisme ambiant dopé par les médias pourrait laisser penser qu’il est « trop tard ». C’est sans doute l’idée que se font nombre de nos concitoyens en réaction aux derniers évènements dramatiques vécus par le pays : le sentiment qu’une frange non négligeable de citoyens – jeune – est en révolte violente, voire en guerre, contre la société qui les a enfantés… Or de ce que nous entendons auprès de nos associations très « engagées » sur des territoires difficiles, de l’écoute dont notre mouvement fait l’objet depuis ces quelques mois, de la prise de conscience des institutionnels comme des jeunes que tout est encore possible dès lors qu’un cap est fixé, savoir susciter l’envie sans faire de vaines promesses, dire ce que l’on va faire et s’y tenir sont autant de changements majeurs qui apportent optimisme et espoir : rien n’est encore perdu !
S de F – Vous vous exprimez dans le bulletin de Secours de France. Qu’attendez-vous de ce dernier ?
P.L S – Un partage de nos valeurs : j’ai cru comprendre que Secours de France, comme nous, a le Pays chevillé au corps ! Il le prouve chaque jour en aidant ceux qui se sont battus pour une Patrie qui les a abandonnés il y a plus d’un demi siècle… Il convient aujourd’hui de nous battre pour insérer dans la communauté nationale tous ces jeunes laissés pour compte… Un soutien dans nos actions, aussi modestes soient-elles dans un premier temps, en les faisant connaître dans les zones sur lesquelles elles seront lancées. Un soutien financier sera toujours le bienvenu… Je vous rappelle notre mot d’ordre qui est aussi notre programme : Vis, aime, deviens la France !